Vous avez forcément dû entendre parler de l’Institut de France. Ou alors vous l’avez vu, mais aucune chance d’ être passé à côté. Rappelez-vous des Jeux Olympiques de cet été, de la cérémonie d’ouverture, et d’Aya Nakamura. La chanteuse française a "performé" sur le Pont des Arts en compagnie de la Garde Républicaine. Rappelez-vous le bâtiment derrière elle ! C’est là que le 28 mars 2025, à 10h, notre classe de première spécialité HLP du Lycée Rabelais a passé la matinée.
Après être descendus du RER et avoir un peu marché, nous nous sommes retrouvés nez à nez avec un magnifique bâtiment : l’Institut de France. Notre programme pendant les heures suivantes a débuté avec une courte visite de la bibliothèque. En y entrant, on est plusieurs à s’être fait la même réflexion : “On se croirait dans Harry Potter !” La grandeur de la pièce et l’ancienneté des livres la rendent impressionnante. Nous avons aussi pu observer des ouvrages originaux de Léonard de Vinci, écrits par sa main et son écriture particulière. En effet, elle n’est lisible que si on la regarde à travers un miroir, fascinant, n’est-ce pas ? Cette bibliothèque au plancher qui grince et à l’odeur de l’ancien nous a mise dans l’ambiance de la conférence à laquelle nous avons assisté ensuite.
Elle s’est tenue sous la coupole abritant le tombeau de Mazarin. Mais qui était-il ? Mazarin est le premier ministre de l’Etat de l’époque et celui qui est à l’initiative de la construction du bâtiment. Dans son testament rédigé en 1661, il lègue une grande partie de sa fortune à la création d’un collège d’élite pour accueillir des élèves venus des nouvelles régions du royaume. Ce sera le Collège des Quatre Nations, inauguré en 1681 sur un terrain auparavant à mauvaise réputation. Fermé pendant la Révolution, le collège ne rouvrira jamais, mais Napoléon Ier en fera le siège de l’Institut de France, ce lieu unique, rassemblant plusieurs académies, dont celle des Inscriptions et Belles-Lettres.
Mais le moment fort, c’était la conférence “Qui a peur de la rhétorique ?”, animée par l’helléniste Laurent Pernot. D’emblée, le ton est donné : la rhétorique fait peur, dérange, parce qu’on l’associe souvent à la manipulation. Pourtant, elle est partout. Elle structure nos discours, influence nos choix, modèle notre perception du monde.
M. Pernot nous rappelle que dans l’Antiquité, la rhétorique était un art noble, enseigné et valorisé. Aristote en avait défini les fondements : convaincre, c’est combiner des arguments logiques (logos), toucher les émotions (pathos) et inspirer confiance (ethos). Avec des exemples concrets, il nous montre que la rhétorique vit encore aujourd’hui : dans les slogans publicitaires (“La vue, c’est la vie”), dans les discours politiques (“Moi président”), ou même dans les appels historiques comme celui du 18 juin 1940.
Nous avons aussi découvert les cinq étapes classiques de la construction d’un discours : l’invention (trouver les idées), la disposition (organiser le propos), l’élocution (choisir les mots justes), la mémoire et enfin l’action (la manière de prononcer, les gestes, la posture). Autrement dit, parler, ça s’apprend. Et bien parler, c’est savoir penser. C’est ce qu’a brillamment démontré M. Pernot. Il est d’ailleurs l’auteur de La Rhétorique dans l’Antiquité, publié en 2000, et de bien d’autres œuvres.
Finalement, nous sommes sortis de la coupole avec une vision novatrice de la rhétorique, de son pouvoir, et de son lien avec l’argumentation. Cette sortie s’est parfaitement accordée avec un de nos axes d’étude : les pouvoirs de la parole. La rhétorique n’est pas un vieux savoir poussiéreux, c’est un outil d’aujourd’hui – et sans doute un super-pouvoir pour demain !